Je sais , les giboulées , traditionnellement , c'est les giboulées de Mars ! mais cette année elles ont fait une exception pour nous ... Ce matin de Pâques a débuté par une pluie obstinée ; je ne sais que décider pour l'invitation que j'ai faite à maman , celà ne convenait que par beau temps quand on mange dehors , car notre cuisine est très froide . Là dessus , mon doux et tendre explose , motif : se sent trop envahi par ma mère , par ma façon de gérer les auxiliaires de vie de ma mère - je reconnais que les trois dernières semaines , on a fait fort . Mais j'avais fait le projet , au cas où il aurait fait beau , de demander à N. , le garde du week-end , gentil comme tout , de monter maman chez nous ( sur son temps de travail ! ) et j'aurais eu plaisir à lui faire visiter le jardin ... Bon , faut pas . On reste dans notre château et on monte le pont-levis .
Je file donc chez maman pour préparer , chez elle , un repas de Pâques improvisé . Mon doux et tendre consent magnanimement à venir faire un saut d'une demi-heure pour le café ... d'accord , ma mère est chiante , comme toutes les personnes âgées elle répéte cent fois les mêmes histoires ... Ensuite , chouette , il fait beau ! mon doux ami repart dans la maison que nous partageons , et j'emmène maman faire une promenade , pour voir les camélias et magnolias en fleur dans les jardins des alentours ; on termine par une petite marche en bordure d'un verger de pêchers en fleurs de ma connaissance , près Gardon . Ma mère est ravie , décide qu'il faut qu'on prenne le thé ... d'accord pour le thé , puis , enfin , je rentre chez moi , un peu rééquilibrée mais fatiguée . Déjà cinq heures , je fonce au jardin pour me ressourcer ... je veux planter les bulbes de freezias , les dernieres petites échalottes , les ornithogales - une nouveauté .
Une giboulée , très bréve , m'interrompt ...Hermione et moi courons nous mettre à l'abri , mais ça s'arrête au bout d'un quart d'heure ; et ensuite je peux m'activer paisiblement dans le calme béni du Dimanche après-midi à la campagne , entrecoupé seulement , de loin en loin , par le doux chant des huppes .
Tout à coup ... voilà -t'y pas que mon copropriétaire , qui a roupillé tout l'après-midi sur le canapé du salon pendant que je promenais ma bavarde mère , arrive avec tout son matériel électrique , disqueuse , masse , etc .. . But : consolider un banc rustique , fait de deux traverses de chemin de fer superposées , ce que je lui avais demandé de faire il y a quelques mois . Seulement aujourd'hui , les tulipes blanches et rouges sont en bouton à vingt centimétres de la disqueuse , qui projette de magnifiques gerbes d'étincelles ; et puis , à chaque pas qu'il fait ses talons frôlent dangereusement les tendres pousses de jonquilles qui émergent du sol ... je sais , mon jardin de fleurs est planté serré , moi j'aime le faire comme ça . Je me contracte à chaque hurlement déchirant de la disqueuse sur les boulons en acier des traverses ... au lieu de planter je surveille avec angoisse le minuscule intervalle entre les grands pieds du manipulateur de la disqueuse et les jonquilles débutantes ... et puis je finis par lui suggérer que ça n'est plus tout à fait le moment idéal .
Vous savez quoi ? l'était vexé ... venait " jardiner " tout près de moi , je suppose ... ou alors , venait témoigner bruyamment qu'il existait ?